« La littérature analytique présente étale, à qui la lit d’un certain œil critique, le fantasme du sujet hors institution, c’est-à-dire promeut sans malaise aucun le duel. Le symptôme majeur de notre époque me paraît celui-là : le duel généralisé. Au bout du compte, il s’agit de sociétés qui – fait inouï dans l’histoire – prétendent récuser l’Interdit, prétention dont les analystes seraient les assureurs, venant éponger le narcissisme social dans un jeu complexe de procédures pseudo-symboliques et tirant eux-mêmes profits subjectifs et sociaux d’une situation de désinstitution massive, à laquelle – pour ma part je n’en doute pas – de nouveaux drames chercheront à mettre fin. »
Pierre Legendre, dans Revenir à l’essentiel (revue Césure 1993)
-* Pétition (encore). Remarques sur la prise de parti.
J’irai sur le canot de sauvetage avec Miller, dont le talent m’égayerait (cf. son excellent dernier Doctor Jérôme et Mister Cahuzac) plutôt qu’avec E. Roudinesco.
Sans attache partisane, et pour le moins très critique à l’endroit des agissements et confusions de discours entretenus depuis des lustres par Miller, dont je considère, en raison même de ses dispositions, qu’il est un poison (politique) pour la psychanalyse, il me faut quand même reconnaître que si le bateau coulait, à choisir, et bien qu’ayant un coefficient homo plutôt bas (la formule, ironique, est de Sollers), j’irai sur le canot de sauvetage avec Miller, dont le talent m’égayerait (cf. son excellent dernier Doctor Jérôme et Mister Cahuzac) plutôt qu’avec E. Roudinesco, dont le nihilisme (ou idéalisme transcendantal) me paraît autrement ancré… [Le mieux que pourrait faire Miller, mais qu’il ne pourra, car comme tout trublion ayant un certain (et malin) génie son côté « maniaque » (je dis parfois, maniaco-féministe), ne le lui permettra pas, c’est de tout lâcher du côté de la psychanalyse, de prendre sa retraite d’analyste, de se retirer comme contrôleur et chef de parti. A la retraite Miller ! Excepté donc pour ses billets d’écrivain. Qu’il ne soit plus un Sollers rentré, qu’il finisse comme billettiste et publiciste de talent, qu’on discutera ! Tu vois lecteur, il n’y a pas plus aimable que moi avec Miller ! Je sors du rêve, et reviens à notre petite affaire.]
Si un bateau coule, je crains que ce ne soit le bateau Psychanalyse, et là je ne vois nul secours d’un côté ou de l’autre…
Mon sentiment est que le duel en cours entre « la famille » et E.R. , et ses soutiens, participe en vérité d’une profonde communauté de position, celle d’un anti-juridisme culturel (prenant aujourd’hui allure d’anti-œdipisme, ou de post-œdipisme), laissant aller, au prétexte du « progressisme », la déconstruction en cours des montages du droit civil, et de façon concomitante, celle des existentiaux universels (Rosolato) de la psychanalyse…
Miller est également plus subtil pour ne pas cogner aussi bêtement à contresens que ne l’a fait E. Roudinesco et quelques autres sur l’apport de Pierre Legendre.
D’une certaine façon je crois que Miller (je parle là de lui, pas de ses aficionados de « Lacan quotidien ») a un peu plus conscience que Roudinesco de la manière dont « l’autre pensée unique » (cf. son article sur « Les deux pensées uniques » dans Libération), vient participer de la même croyance au « rapport sexuel » que la première… Miller est également plus subtil pour ne pas cogner aussi bêtement à contresens que ne l’a fait E. Roudinesco et quelques autres sur l’apport de Pierre Legendre. Certes, il s’emploie comme les autres à circonscrire cet apport, mais je pense qu’il le lit et « sait » que ce qui s’y engage n’est pas réductible à je ne sais quel conservatisme réactionnaire ; il le sait mieux que beaucoup, mais son besoin (son fantasme) de faire le malin – i.e. d’occuper toutes les places de discours et d’interprète – est tel, qu’il ne peut en tirer conséquences pour lui-même.
Il est la caricature la plus active de cette « politique de la psychanalyse » à laquelle souscrivent institutionnellement tant de « lacaniens ».
Avec bien sûr des degrés.
Miller, après avoir proféré son « la structure œdipienne n’est pas un invariant anthropologique » (cf. mes remarques dans Les pétitions et l’interprète, sur ce site), est venu un peu tempérer dans ce récent article de Libération un déséquilibre par trop marqué… Il n’en continue pas moins, après une magnifique dénégation – « cependant, je ne veux pas tirer mon épingle du jeu » (j’aime beaucoup ce « cependant ») – de reprendre la formule, mille fois employée par Roudinesco, du devoir supposé des psychanalystes « d’accueillir et d’accompagner le nouveau ». Il écrit : « Accompagnons le mouvement. Respectons et enterrons l’ancien. Accueillons et tempérons le nouveau. » Ce que je trouve, après la brillance et la meilleure intuition, d’une nullité absolue !
Pour l’interprète – pour la politique de l’interprète – l’essentiel n’est pas « d’accompagner » ou « d’enterrer », mais bien d’abord de soutenir l’écart, de distinguer l’ordre juridique-symbolique, celui de la structure (langagière) œdipienne, des réalités sociales et familiales les plus diverse, autrement dit, par-delà les contingences « actuelles » de demeurer médian (interprète, inactuel) dans la relation du sujet à la Loi, à la structure qui institue le sujet comme tel… Ce qui introduit un autre souci : celui justement de savoir si, non pas dans le réel, mais symboliquement, l’étayage structural (langagier, juridique) de la « famille conjugale moderne » tient ou ne tient pas. Et à quoi la déconstruction peut mener…
Des analystes pourraient-ils ne pas prendre en considération, au prétexte d’une « nouvelle économie psychique » (qui n’est au fond que celle d’un déploiement des formes « actuelles » de la perversion), l’inactualité constitutive du transfert, le fait qu’il ne saurait y avoir subjectivation d’un sujet hors les conditions d’une scène qui ne soit au final liée, ne serait-ce que pour la pervertir, à la structure œdipienne, aux nominations de la parenté et de la différence des sexes ?
La « famille conjugale moderne » ne resterait-elle pas, et au premier chef pour les partisans les plus actifs du « mariage pour tous », la référence à partir de laquelle chacun engage, par-delà toute situation concrète, et quelle que soit sa position subjective quant au sexe, sa relation identificatoire (inconscient compris) aux figures père / mère ?
L’origine pour le sujet – la symbolisation de la scène fondatrice – est toujours devant soi.
L’origine pour le sujet – la symbolisation de la scène fondatrice – est toujours devant soi ; l’origine, en tant qu’elle est le présent et le futur du sujet, est nouée à cette fabrique subjective de la représentation fondatrice père / mère, autrement dit à l’assomption subjective de ce que nous nommons « castration symbolique ». Soit l’assomption subjective de notre place de tiers exclu, irrémédiablement séparé, de la scène primitive.
L’institution du sujet tient aux nominations de la parenté – cela est compris par la plupart, mais ce qui reste incompris, et hypothèque la réflexion des analystes sur le droit, c’est en quoi, comme en eut d’ailleurs l’intuition Lacan (cf. par exemple L’envers de la psychanalyse, p.17), le droit est dans nos sociétés le relais culturel par lequel le langage structure le réel. Il n’y a pas d’élaboration du rapport des figures parentales entre elles- ce rapport dont dépend « le sort psychologique de l’enfant » – qui ne s’étaye des nominations de la parenté instituées par les catégories juridiques (langagières) de la filiation et les montages du droit civil. Il n’y a pas le langage d’un côté et l’institutionnalité de l’autre, comme il n’ya pas le sujet de la parole d’un côté et l’institutionnalité du langage de l’autre. Lecteur, pardonne moi ce rabâchage.
Les deux camps visent à ramasser la mise politique, « progressiste » of course, du transfert institutionnel…
Ce que ne me semble pouvoir interpréter tous ces analystes qui viennent prendre fait et cause pour Roudinesco dans la querelle, c’est que Miller – qui est pour parti un Lin Piao qui aurait réussi – reste aussi l’enfant, l’enfant surdoué mais mal divisé, qui cogne avec jubilation sur la matrone honnie, en y restant toutefois identifié : identifié à la même position « gouvernante » sur la fratrie et sur le père n’est-ce pas… Les deux camps visent à ramasser la mise politique, « progressiste » of course, du transfert institutionnel… Le prix étant de fermer les yeux sur le ressentiment enfoui des suiveurs n’est-ce pas, et donc de ne rien vouloir apprendre de nouveau sur son propre Mister Hyde…
Miller, l’âge et le talent n’y font rien, reste depuis la dissolution de l’ECF (et les passages à l’acte divers qui s’en suivirent), un analysant en déshérence, un analysant qui cherche, sinon son juge ou son père, un interprète…
Dans l’insu du désir (comme pour tous), l’insu de sa propre demande tout bêtement, derrière les grands airs, Jacques-Alain manifeste sa défense (pour résister il résiste), embarquant la « famille » - à moins que cela ne soit d’abord lui qui soit embarqué par La Femme… – vers le judiciaire… Il est assez amusant d’observer que ce recours au judiciaire – alors que les deux camps opposés se tenaient à l’époque de la « dissolution » de l’ECF, comme toujours, dans la même impasse, le même clivage loi symbolique / loi juridique – fut en son temps ( si j’en ai bien compris les éléments publics à notre disposition) agi par certains des tenants de la non dissolution à l’encontre de Lacan…
Legendre, dans son article de 1981, Administrer la psychanalyse, dans son article de 1981, Administrer la psychanalyse.
Notes sur la dissolution de l’Ecole freudienne de Paris (revue Pouvoirs, no11, nouvelle édition), avait insisté sur le fait que l’amour politique met toujours en œuvre un juridisme effréné.
Je cite cet article, toujours si actuel, un peu longuement, car il touche aux sources de notre (petite) affaire :
« … le juridisme (opère) précisément, en tant que discours qui cimente le collage, rend plausible l’érotisme en politique, éternise le transfert dans un étrange enlacement avec un objet d’amour qui soit le même pour tous. Plus le discours est bétonné, plus solide est la construction, plus vénérable est la légalité du savoir.
Ainsi avons-nous assisté, au fil des années, à l’élaboration d’une glose non reconnue comme telle.
… / l’effort de dissolution menaçait quelque chose d’essentiel : le juridisme sans lequel l’amour politique inévitablement se défait. L’acharnement à produire de l’institution, en faisant la part trop belle au juridique officiellement abhorré, est un signe qui n’a pas manqué d’émouvoir nombre de personnes (qui toutes avaient voté la dissolution) , dont il est tout de même difficile de prétendre qu’elles travaillent désormais au naufrage de l’œuvre de Lacan.
…/ C’est peu dire que Lacan s’est trouvé, du temps de l’EFP, porteur d’une demande de tyrannie et, de ce fait , promu Père de cette étrange Patrie qu’est devenue pour beaucoup la Psychanalyse, espace nostalgique capable de produire un Etat. La relance précipitée d’une Ecole a mis au premier plan un Lacan chef de famille, ré-institué à l’usage de tous en tant que tel. Je veux dire par là que Lacan est investi chef de famille en cette affaire non seulement au sens mystique de l’expression su justement reprise par Hobbes à l’dresse du pape, mais au sens de la scène inscrite par le droit civil pour définir certains effets de légitimité. Dans cette zone, repérée par Freud, s’agite la question de la mise à mort du chef de la tribu. / … /
Ainsi le juridisme analytique porte-t-il à conséquences, en tant que démonstration a contrario. L’incapacité, de la part des promoteurs de la précipitation, d’avancer la moindre preuve théorique hors la surenchère habituelle et de sortir des sentiers battus en matière d’organisation démontre une fois de plus que l’institution analytique est une contradiction dans les termes. On joue sur les mots, en évitant de s’interroger au niveau le plus simple : qu’est-ce qu’une institution ?
/…/
Restons-en aux thèses combattantes, qui gravitent toujours autour d’un Lacan-paravent. Ce point nous intéresse ici directement. Une personne qui ne fait pas mystère de son penchant hagiographique, s’est laissée aller à comparer Lacan à de Gaulle. Voilà au moins un propos qui porte, car l’apologétique, quel que soit le Nom célébré, travaille à justifier indéfiniment l’indéménageable d’une institution avec le seul argument qui éternellement nous mobilise pour la seule cause vraiment humaine : l’illusion que le pouvoir gît dans un corps. Il n’est peut-être pas négligeable de rappeler que dans l’ex-EFP, notamment pour une partie de l’entourage proche de Lacan , le maoïsme a exercé une très violente fascination à propos de laquelle les intéressés n’ont pas jugé bon de s’expliquer, ce qui d’un point de vue de rigueur analytique n’aurait pas manqué sans doute d’effets. Incontestablement, si j’en juge également par l’attrait exercé sur la Compagnie de Jésus par Lacan, la question d’une assignation religieuse du pouvoir n’a guère été posée, sauf au fil de son enseignement par Lacan lui-même, et pour son propre compte d’analysant.
Au fond peu importe la référence à tel ou tel Nom du pouvoir divinisé. Qu’il s’agisse du repérage maoïste ou chrétien, qu’il s’agisse de formulations apparemment révolutionnaires ou rappelant une sorte de moralisme du Devoir sous l’égide du travail, de la famille passionnée pour la Vérité etc., nous retrouvons dans cette bataille de saints un élément constant de l’organisation centraliste telle que la France la produit et reproduit : un savoir-faire juridique pour abriter les fantasmes les plus durs(je veux dire les plus résistants à l’analyse), et permettre à la haine de fonctionner en douce c’est-à-dire de la manière la moins repérable. Le centralisme est construit là-dessus.
/…/ Sur le désir de Lacan, sur la haine dont il est l’objet et qui s’abrite si bien dans l’amour, sur quelques autres grandes questions posées par le pari de la dissolution, j’attends d’apprendre quelque chose qui ne serait pas dérisoire. »
Legendre, qui je pense a fini depuis longtemps « d’attendre », terminait donc ainsi son article…
Mais qu’on entende bien, la critique du juridisme n’est pas ici soutenue dans l’ordre d’un anti-juridisme ! Et il n’est donc pas dans l’esprit de l’interprète d’exclure tout recours au judiciaire, car naturellement celui-ci, pour dénouer un conflit, peut s’imposer. [Dans la sphère d’exercice qui a été la mienne, celle de la Justice des mineurs, j’ai longuement travaillé cette question : celle de l’économie du « recours au juge » ; cf. par exemple sur le site psychasoc mes derniers textes.]
En l’occurrence, concernant aussi bien la vieille affaire de la dissolution que cette dernière (petite) affaire, ce recours au judiciaire aurait du pouvoir apparaître pour ce qu’il est d’abord : un transfert institutionnel de la « famille », plutôt ridicule, vers un droit mis en place de légitimer l’autorité morale du nouveau chef de famille, comme si crime de lèse-majesté il y avait eu, et comme si donc la disputatio ne pouvait suivre son cours, et les analystes des deux bords encaisser quelque « virulence »…
C’est aussi pourquoi, il est à mes yeux on ne peut plus ridicule que des psychanalystes – mais n’a-t-on plutôt là d’abord affaire à des universitaires et des docteurs ? ce qui rend les choses plus claires – viennent, si j’ose dire en pendant, s’émouvoir et ainsi s’engager en masse dans cette pétition de « soutien » à E. R. !
Je note qu’ils y dénoncent sans distinction son recours au judiciaire et les mots pamphlétaires, certes cruels, de Miller à l’endroit de Roudinesco – dénonciation très collet-monté pour des psychanalystes, dont j’observe qu’ils ont été moins troublés et réactifs à la façon dont E.R. a pu amalgamer il y a peu publiquement, dans un article de Libération, des analystes respectables hostiles au « mariage pour tous », à des individus « se livrant à leur sport favori : la chasse aux homosexuels ».
C’est très curieux, car si des analystes, dans une telle affaire, se font d’abord justiciers politiques (comme s’il y avait en l’affaire un « bon côté » !), on peut se demander ce qu’il en est de leur capacité à se représenter l’autre scène du conflit Miller / Roudinesco…
Comment se fait-il que tant d’analystes basculent ainsi dans une prise de parti, alimentant le « spectacle » a contrario du sage conseil de Freud au moment de la polémique avec Jung de « ne pas se donner en spectacle », de « se retenir » ?
Comment se fait-il qu’ils se précipitent, préférant une bienséance supposée à la recherche de la vérité analytique ? Comment ces analystes pourraient-ils dès lors interpréter la position qu’ils occupent eux-mêmes dans le mythe œdipien institutionnel, et de là se tenir, avec ironie critique et détachement, comme des « tiers neutres » dans la scène institutionnelle, la scène institutionnelle des cas ?
Mon sentiment est que nombre de ces signataires sont embarqués, en raison de leur propre juridisme insu, dans un contre-agi en miroir, comme si Miller et Roudinesco, quant à la position politique institutionnelle (de pouvoir) revendiquée par l’un et par l’autre, ce n’était bonnet blanc et blanc bonnet.
Une de nos nouvelles Georges Sand - vous savez, une de celles qui voudraient débarrasser l’humanité du diable comme disait Baudelaire –, officiant sur le site Œdipe, l’a bien senti, se demandant à propos de cette pétition, embarrassée par son bon cœur, son œcuménisme, « La signerai-je ? Oui, non, peut-être. »
De là, réfléchissant à ce qu’il en fut au moment de la dissolution, et au « choix » impossible qui se présenta pour les plus modérés dès lors que les extrémistes des deux camps réussirent à cristalliser le duel – précipitant l’agi et entravant l’effort d’élaboration analytique –, je me dis qu’au fond quelqu’un comme Dolto qui refusa la dissolution était finalement, bien qu’accusée de « bondieuserie », plus soucieuse de la distinction des figures – de la non identification de la figure de Lacan à celle de l’ECF –, et donc en vérité plus décollée de la Cause (et du fantasme homoparental, des « parents combinés »), que nombre des plus radicaux de la dissolution…
Pourquoi une telle pétition de soutien à E.R. ? Que « menace » donc notre histrion à travers ce recours au judiciaire (dont il suffit d’attendre les suites), et le propos incriminé sur la « matrone » ? Que viennent là « soutenir » et « défendre » de leur propre position institutionnelle nombre de ces signataires, aux travaux certes estimables, bien que peut le plus souvent marqués de « l’hypothèque qui grève la psychanalyse d’aujourd’hui, /…/ , de ce refus des cliniciens de prendre en compte « la constitution sociale de la parole, c’est-à-dire la quintessence du phénomène institutionnel, son lien avec la parole. » (dans Revenir à l’essentiel, revue Césure) ?
Miller n’aurait-il pas au fond "touché" plutôt juste dans le propos qui lui est incriminé, propos de pamphlétaire dans lequel il évoque la figure d’E.R. comme celle de la matrone ?
Mais une de ces grandes faiblesses, qui le rend je le crains quelque peu « maniaque », politiquement maniaque (ce dont il cherche à s’extraire par la qualité de son style et la liberté de ses « billets »), est de ne pas se reconnaître comme étant lui-même, à travers sa Cause, enlacé, identifié-collé à cette figure de la Matrone, figure primitive d’une Mère gouvernante qui veut garder la main sur tous ses petits… Je vais très vite, mais on retrouve là à nouveau tout ce que Rosolato avait si bien analysé du complexe de croyance…
Qu’attend Miller du judiciaire ? Le sait-il ? Que veulent les pétitionnaires ?
Mon interprétation, le lecteur venu jusqu’ici l’aura compris, est que toute cette (petite) affaire repose sur un refoulement partagé, celui des frères ennemis : le refoulement de la question de la place (de la position de discours) que chacun occupe dans la scène institutionnelle – scène qui de structure reste œdipienne.
Voilà qui les amène à circonscrire la question dogmatique, la question juridique, et dès lors pour la plupart de ceux-là, qui continuent à cliver loi symbolique / loi juridique, signifiant/signifié, à ne rien vouloir considérer de la folie politique - de la mise à mal de la base institutionnelle du sujet - que représente la déconstruction des digues du droit civil en cours. Une affaire autrement sérieuse pour qui prétend à une politique (une clinique moderne) du sujet de la parole.
Daniel Pendanx
Bordeaux, avril 2013